LE « DEMANTELEMENT DE PROPRIETE » AU SERVICE DES COLLECTIVITES PUBLIQUES EN GENERAL ET DES COMMUNES EN PARTICULIER

Les 15 et 22 mars prochains, les citoyens français seront appelés aux urnes pour élire leurs conseillers municipaux. Et pour séduire les électeurs, les promesses vont bon train …

Pourtant, la plupart de ces promesses ne pourront pas être tenues.Les communes, dans leur grande majorité, ont atteint des taux d’endettement préoccupants et la suppression de la taxe d’habitation, sans qu’aucune compensation ne soit prévue, risque de contraindre les autorités communales à privilégier les économies aux dépenses d’investissement, … tout en augmentant les impôts ! Des communes, désormais sans argent, et bientôt sans compétence; privées de leur pouvoir de décision par une intercommunalité qui semble n’avoir été inventée que pour mieux expliquer aux administrés qu’il faut savoir payer pour ne rien recevoir !

Cette situation politique et financière des communes françaises est d’autant plus regrettable qu’elles apparaissent aujourd’hui, par leur proximité avec leurs administrés, comme les seules collectivités publiques capables de répondre à cette crise de la représentativité démocratique qui s’exprime depuis plus d’un an avec violence dans la rue ! Les communes peuvent et doivent re-devenir un lieu d’expression citoyenne. Mais à quoi bon ouvrir aux administrés la porte de la démocratie locale

participative si leurs élus n’ont plus les moyens de gérer l’intérêt général ?

Certes, les communes ont depuis longtemps pris l’habitude de solliciter des partenaires privés pour surseoir à leurs difficultés financières et contractent des partenariats public-privés leur permettant de confier à un partenaire privé tout ou partie de la conception, de la construction, du financement, de l’exploitation et de la maintenance d’infrastructures publiques et / ou de services associés. Mais ces partenariats tournent parfois au cauchemar pour les collectivités qui se retrouvent privées de leur liberté d’action, prises au piège entre une mauvaise maitrise des coûts et des retards de construction.

La Cour des comptes européenne, dans un rapport public du 20 mars 2018, recommandait même de cesser d’y recourir, emboitant ainsi le pas au Sénat qui rendait en 2014 un rapport intitulé « les contrats de partenariat: des bombes à retardement ».

C’est dans ce contexte qu’il nous faut trouver d’autres sources de financement pour ces collectivités publiques et réinventer ainsi d’autres formes de partenariats de nature différente. Le démantèlement de propriété qui propose de dissocier la propriété économique de la propriété d’usage pourrait être l’un d’entre eux.

Ainsi, comme dans le démembrement de propriété où l’usufruitier et le nu-propriétaire se partagent, ensemble, la pleine propriété, le propriétaire économique et le propriétaire de l’usage, ensemble, par le démantèlement de propriété, se partageraient cette même pleine propriété des investissements réalisés. Mais alors que l’usufruitier dispose du pouvoir d’user de son bien et d’en percevoir les fruits et que le nu-propriétaire se réserve le droit d’en disposer librement, le propriétaire économique se verrait confier uniquement le droit de percevoir le revenu de son investissement et le propriétaire de l’usage le droit d’en assurer la gouvernance .

L’un et l’autre conviendraient librement du montant à payer par le propriétaire de l’usage au propriétaire économique, ainsi que des conditions dans lesquelles chacun d’eux pourrait disposer de sa propre propriété.

Appliqué aux investissements réalisés par les communes, le démantèlement de propriété permettrait donc de trouver d’autres modes de financements que l’impôt ou la dette.

En effet, l’investisseur public ou privé financerait la construction de l’infrastructure (salle des fêtes, maison de retraite, parking etc ….) dont il deviendrait propriétaire économique et à ce titre percevrait une rémunération librement négociée avec la collectivité publique.

Le montant de cette rémunération correspondrait à un revenu d’intérêt répondant aux caractéristiques d’un placement à long terme dans une logique de gestion de trésorerie. A l’heure des taux d’intérêts négatifs, beaucoup d’investisseurs, privés ou publics, pourraient être séduits par un revenu minimum garanti !

Dans les conditions déterminées par les parties, cette propriété économique pourrait être cédée à un autre propriétaire économique et permettre ainsi au propriétaire économique initial de percevoir le remboursement de son investissement.

La commune, propriétaire de l’usage du bien financé par le propriétaire économique, serait dans l’obligation de verser le revenu convenu. Pour autant elle ne pourrait être contrainte au remboursement de l’investissement réalisé par lui puisque que la commune n’aurait pas vocation à devenir propriétaire économique.

De son côté, pour pouvoir payer le revenu convenu au propriétaire économique, la commune concéderait à un exploitant, public ou privé, un droit d’usage de cette infrastructure et / ou de ce service public. Cette concession serait octroyée avec un cahier des charges précis mettant en évidence les conditions d’exploitation à respecter par l’exploitant. Si elles n’étaient pas respectées ou si la performance de la gestion n’était pas assurée, la commune garderait toute liberté de résiliation ou de non reconduction de la concession. La rémunération de la concession perçue par la commune permettrait de faire face au paiement du revenu convenu avec le propriétaire économique.

Le démantèlement de propriété permettrait donc à la commune, en sa qualité de propriétaire de l’usage de l’investissement, de garder toute liberté et toute indépendance, vis à vis du propriétaire économique qui, une fois son revenu perçu, n’aura plus son mot à dire.

Elle garderait également la maitrise de sa propriété vis à vis de l’exploitant pour s’assurer que le concessionnaire respecte les conditions d’exploitation pour servir l’intérêt général.

Plus qu’une source de financement, le « démantèlement de propriété » mis au service des collectivités publiques en général et des communes en particulier permettrait de jeter les bases d’une nouvelle économie fondée sur une totale égalité entre le Capital et le Travail.

Ensemble, le propriétaire économique et le propriétaire de l’usage s’accorderaient pour servir l’intérêt général, sans que ni l’un, ni l’autre, ne renonce à leur droit de propriété respectif.

Jean-Philippe CLAVEL

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